Pierre Hurmic et le logement neuf à Bordeaux : le bras de fer

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Avatar de l'auteur "Caroline Tison" Caroline Tison

le 15 avril 2021

[ mis à jour le 07 juillet 2021 ]

SOMMAIRE

La politique en matière de logement neuf à Bordeaux de Pierre Hurmic, élu maire depuis bientôt un an, fait parler d’elle. Ayant axé son programme électoral vers l’écologie et le logement, P. Hurmic entend bien le tenir et réaliser de profonds changements, en se détachant des traces d’Alain Juppé, maire reconnu bâtisseur et rénovateur de Bordeaux.

Quelles sont les mesures adoptées par le nouveau maire de Bordeaux ? Comment la promotion neuve réagit-elle à ce virage ?

Un programme centré sur l’écologie et le logement

En février 2020, la rédaction détaillait les différents programmes des candidats bordelais aux Municipales. Pierre Hurmic, favori avec Thomas Cazenave, s’engageait fortement pour le logement et l’écologie. Membre d’Europe Écologie Les Verts, il avait fait de ces deux thèmes son cheval de bataille.

D’ailleurs, les 2 thématiques constituaient essentiellement le nerf de la guerre de ces Municipales. Pierre Hurmic proposait de nombreuses mesures.

Le candidat avait organisé son propos en liant immobilier et écologie à travers plusieurs points d’actions. Son argumentaire : en remettant sur le marché les logements inoccupés, en rénovant les biens, on pourrait alors limiter les constructions neuves, endiguer la demande de logement et ainsi lutter contre l’artificialisation des sols.

Cette lutte farouche du maire contre l’artificialisation des sols, et l’étalement urbain qui en découle, entre en résonnance parfaite avec le projet de loi Climat & Résilience. En France, la démographie croissante oblige le parc immobilier à s’étendre. Produire plus de logements pour loger tout le monde. Depuis 1999, l’Hexagone a vu progresser sa population de 4,2 millions d’habitants.

L’objectif du « million d’habitants » d’ici 2030 à Bordeaux a de quoi inquiéter les élus écologistes. Si les promoteurs immobiliers bordelais se mettent depuis déjà quelques années au diapason du vert, Pierre Hurmic entend bien freiner leurs ardeurs.

Selon le maire, la ville de Bordeaux disposerait de 11 000 logements vacants. Lors de sa campagne, il soulevait, avec Philippe Poutou et Thomas Cazenave ce problème. Parmi ses propositions, P. Hurmic abordait l’idée d’une exonération temporaire de la taxe foncière pour les propriétaires réalisant des travaux d’économie d’énergie dans leur logement, le rendant ainsi plus sain et habitable, et pouvant loger des personnes en demande.

Aussi, Pierre Hurmic souhaitait imposer un quota de 50 % de logements sociaux aux promoteurs, pour les programmes neufs implantés dans les quartiers déficitaires.

Selon la loi ALUR, la part de logements sociaux doit atteindre 30 % pour toute opération immobilière de plus de 800 m². Aussi, un quota minimal de 25 % de loyers dits « accessibles » est imposé sur l’ensemble du territoire français. Ce quota peut monter jusqu’à 30 % dans les villes où le logement social est déficitaire.

Les baux réels solidaires : l’accession sociale à la propriété à Bordeaux

Le Bail Réel Solidaire (BRS) est un dispositif très récent ayant pour objectif de favoriser l’accession sociale à la propriété en séparant le bâti du foncier. Destiné aux ménages modestes, ce bail permet d’occuper le logement à titre de résidence principale, et en ayant des droits réels immobiliers pouvant être revendus, donnés ou transmis lors d’une succession. Le terrain reste la propriété des offices fonciers solidaires, tandis que le bâti est propriété des acheteurs.

À Bordeaux, la résidence NOBEL, de Gironde Habitat, fait partie de ce dispositif et propose des biens avec une TVA réduite à 5,5 % (au lieu des 20 % habituels), et pour lesquels il est possible d’acheter le logement en bénéficiant d’un prêt à taux zéro (ptz) et du passeport 1er logement de la ville.

La particularité du bail réel solidaire est de séparer le foncier du bâti. Le terrain est acquis par un OFS (Organisme de Foncier Solidaire), puis la construction du programme immobilier débute. Le ménage acquiert le logement selon un plafond de ressources (basé sur le PSLA). Le prix d’acquisition de ce type de bien est minoré du coût du terrain (15 à 30 %). En contrepartie, le foyer doit s’acquitter d’une redevance liée au droit d’occupation et aux frais de gestion du terrain.

Pour une acquisition en BSR, le plafond des prix varie. Bordeaux étant en zone B1, la valeur hors taxe du mètre carré d’un logement neuf acheté selon le dispositif est de 2 965 €.

L’édile de Bordeaux militait pour ces baux réels solidaires lors de sa campagne. C’est désormais chose faite en 2021 avec la livraison de programmes dédiés au dispositif. La ville de Bordeaux montre l’exemple en étant la première de France à inaugurer le bail réel solidaire, initié pour lutter contre la spéculation immobilière.

Un an après les élections municipales

Qu’en est-il du programme municipal établi par Pierre Hurmic, presque un an après son élection à la mairie de Bordeaux ?

Vers un coup de frein à l’immobilier neuf bordelais ?

© JeanLucIchard - Shutterstock

En décembre 2020, à peine 6 mois après l’entrée de Pierre Hurmic à la mairie, nous détaillions les inquiétudes de la promotion immobilière à Bordeaux.

Alors que l’écologiste avait fait savoir aux promoteurs soucieux que les projets immobiliers entamés ne seraient pas entachés par sa politique verte, voilà qu’on apprend récemment que Pierre Hurmic se positionne contre un programme de Bordeaux Euratlantique en cours de construction.

Le programme de la rue Amédée Saint-Germain risque fort de se voir remis aux calendes grecques. Implanté près de la gare Saint-Jean, ce projet dérange. Pierre Hurmic argumente :

"Il faut continuer à construire des logements à Bordeaux, tout en préservant le principe du "zéro artificialisation" des sols. Mais on ne peut pas construire de nouveaux quartiers contre les riverains et sans un climat serein d'accueil et d'envie partagée. C'est pourquoi je demande à l'EPA l'arrêt de ce projet Amédée Saint-Germain."

Le maire entend bien stopper l’urbanisation des friches de la SNCF, et l’a fait savoir en demandant l’arrêt du projet d’aménagement au conseil d’administration de l’EPA Euratlantique le 07 avril 2021, suite à une pétition rassemblant plus de 1 000 signatures.

Quant au projet de la Rue Bordelaise, il fait encore débat. Cette artère commerçante en création a été amendée en janvier 2021 par le maire. Parmi les transformations du projet, les logements devraient être plus nombreux, et les places de stationnement limitées.

Là encore, P. Hurmic a dû négocier avec l’établissement public d’aménagement (EPA) Euratlantique et l’opérateur Apsys. Si l’arrêt pur et simple du projet a été écarté, car trop coûteux (100 millions d’euros), le maire a obtenu son amendement.

À la suite de sa conférence de presse du 10 septembre 2020 où il s’est présenté comme étant un « maire régulateur », Pierre Hurmic a précisé son ambition en matière d’immobilier neuf à Bordeaux.

Des projets immobiliers « réorientés » et plus verts

© sylv1rob1 - Shutterstock

Dans un souci de lutte contre l’artificialisation des sols et de végétalisation de la ville, le maire écologiste souhaite que les maîtres d’œuvre des programmes de Brazza, Bastide-Niel et Euratlantique tournent un peu plus leurs desseins vers l’environnement. Alors que l’immobilier neuf insiste déjà sur des normes environnementales très strictes, P. Hurmic en demande plus.

Les constructions neuves sont soumises à des réglementations environnementales, dont la RT2012, qui sera bientôt remplacée par la RE2020.

La RT2012 fixe un plafond de consommation énergétique à 50 kWh/m²/an.

Les résidences neuves disposent également d’isolations thermiques et acoustiques aux normes bien spécifiques.

Sur le site de Bastide-Niel, P. Hurmic demande la végétalisation des voiries, plus de plantations et un fractionnement des îlots. Les matériaux de construction doivent également être revus, au même titre que la composition architecturale des bâtis. À Brazza, il est demandé une correction du plan paysager.

Pierre Hurmic annonce également la création d’un label « bâtiment frugal Bordelais » et la révision du plan local d’urbanisme devant devenir un « bio PLU ».

Portrait de Pierre Hurmic : engagé et vert

Lelefa, CC BY-SA 4.0 , via Wikimedia Commons

En fonction à la Mairie de Bordeaux depuis le 03 juillet 2020, Pierre Hurmic a arrêté son activité d’avocat en conséquence. Parmi les affaires qu’il a traitées, il s’est notamment chargé de la défense de Bertrand Cantat pour l’assassinat de Marie Trintignant ; mais aussi des plaintes des associations et communes contre la prolongation de la LGV entre Toulouse et l’Espagne. Aussi, il s’est engagé dans la lutte judiciaire contre les compteurs électriques Linky.

Soutenu par Alain Juppé, P. Hurmic s’est positionné pour un « code de la rue » annonçant des doubles-sens cyclables dans le centre-ville de Bordeaux, la mise en place de flèches clignotantes sur les feux tricolores pour les cyclistes, ou encore la circulation autorisée des personnes à rollers sur les voies de bus. Lors de la semaine de la mobilité, le code de la rue a été annoncé et mis en place en septembre 2007.

Diplômé de Sciences Pô Bordeaux, il est impliqué dans la vie politique de la ville, de la métropole et de la région depuis de nombreuses années.

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