PLFSS 2026 : une mesure pour encourager votre employeur à payer vos intérêts d'emprunt

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Avatar de l'auteur "Hervé KOFFEL" Hervé Koffel

le 28 octobre 2025

[ mis à jour le 28 octobre 2025 ]

SOMMAIRE

Un amendement au budget de la Sécurité sociale pour 2026 veut ressusciter un mécanisme centenaire qui permet aux entreprises de financer les intérêts d'emprunt immobilier de leurs salariés. Bridé jusqu'ici par une fiscalité paralysante, ce dispositif pourrait transformer l'accès à la propriété de centaines de milliers de primo-accédants si le Parlement vote la mesure proposée. L'examen de ce texte transpartisan débute cette semaine à l'Assemblée nationale, avec un objectif : rendre abordable ce qui ne l'était plus.

Un dinosaure fiscal qui sort de l'ombre

Contrairement à ce que l'on pourrait penser, le dispositif n'est pas du tout une nouveauté, il fêtera même bientôt son 104ème anniversaire. Créé en 1921 par la Société financière pour l'accession à la propriété (Sofiap), ce mécanisme permet aux employeurs de prendre en charge tout ou partie des intérêts d'emprunt immobilier contractés par leurs salariés. À l'origine, seules les entreprises publiques pouvaient y recourir. La Sofiap, filiale commune de La Banque Postale et de la SNCF, a d'ailleurs d'abord servi les agents de ces deux mastodontes avant d'ouvrir timidement ses portes au secteur privé fin 2022.

Aujourd'hui, 600 000 salariés sont potentiellement éligibles à ce coup de pouce. Le soutien moyen accordé dans le cadre de ce dispositif atteint 1 727,64 € par an, une somme loin d'être négligeable quand on sait que chaque point de pourcentage de taux immobilier peut faire basculer un projet d'achat. Mieux encore, cette aide se cumule avec le prêt à taux zéro de l'État et le prêt Action Logement à 1 %, tous deux réservés aux primo-accédants.

Un trio d'aides qui, sur le papier, devrait transformer le parcours d'achat de milliers de ménages. Sur le papier seulement. Car dans les faits, presque personne ne connaît ce dispositif, et pour cause...

Des charges employeur qui plombent tout

Voilà le hic : les entreprises qui prennent en charge les intérêts d'emprunt de leurs salariés doivent s'acquitter de 55 % de cotisations sociales sur les sommes versées. Le fisc considère cette aide comme un avantage en nature, au même titre qu'une voiture de fonction ou des tickets restaurant. Résultat, pour chaque euro d'aide apporté au salarié, l'employeur débourse 1,55 €. Un coût prohibitif qui a transformé ce dispositif en serpent de mer : on sait qu'il est là, mais on préfère faire semblant de ne pas le voir.

Cette fiscalité punitive explique pourquoi le mécanisme reste marginal malgré un contexte qui devrait le rendre indispensable. En octobre 2025, les taux immobiliers moyens au national oscillent entre 3,10 % sur 15 ans et 3,36 % sur 25 ans, selon les données du courtier CAFPI. Une baisse notable par rapport aux 4 % dépassés il y a deux ans, certes, mais un niveau qui continue de verrouiller l'accès au crédit pour les jeunes ménages et les classes moyennes.

Un couple qui emprunte 250 000 € sur 25 ans à 3,36 % remboursera près de 116 000 € d'intérêts sur la durée totale du prêt. Si un employeur prenait en charge ne serait-ce que 30 % de ces intérêts via le dispositif Sofiap, cela représenterait 34 800 € d'économie pour les emprunteurs. Mais avec 55 % de charges patronales, cette générosité coûterait 53 940 € à l'entreprise. Difficile de convaincre un directeur financier dans ces conditions.

Budget 2026 : L'allègement d'une mesure qui peut changer la donne

L'amendement n°AS1469 déposé au projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2026 veut casser ce verrou. Le texte, porté par le député Lionel Causse (Ensemble pour la République) et cosigné par des parlementaires de tous bords : Valérie Rossi (Socialistes), Mickaël Cosson (Démocrates), Christelle Minard (Droite Républicaine), Anne-Cécile Violland (Horizons), Camille Galliard-Minier, Hervé Berville, Moerani Frébault et Sébastien Huyghe (Ensemble). Il propose une exonération massive de cotisations sociales. Seules resteraient dues la contribution sociale généralisée (CSG), la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) et un forfait social au taux de 20 %.

Concrètement, les charges patronales passeraient de 55 % à environ 30 %, soit une division par presque deux. Pour encadrer le dispositif et éviter les effets d'aubaine, l'amendement fixe un plafond : la prise en charge annuelle ne pourra excéder 8 % du plafond annuel de la Sécurité sociale, soit 3 709,44 € en se basant sur le PASS 2025. Un montant bien supérieur au soutien moyen actuel de 1 727 €, qui laisse entrevoir une vraie marge de manœuvre pour les entreprises.

Une proposition similaire avait été déposée en mars dernier mais n'avait jamais été examinée par le Parlement. En la glissant dans le PLFSS, ses promoteurs espèrent accélérer son adoption dans un contexte budgétaire tendu où chaque mesure doit se justifier.

Le présent amendement vise à créer un cadre juridique clair et incitatif pour généraliser ce dispositif. Il propose :

  • Une prise en charge facultative par l’employeur des intérêts d’emprunt immobilier contractés par un salarié primo-accédant pour sa résidence principale ;
  • Une exonération de charges sociales sur ces sommes, hors CSG, CRDS et un forfait social de 20 %, dans la limite annuelle de 8 % du plafond annuel de la sécurité sociale (soit 3 709,44 € en 2025) ;
  • Une articulation claire avec la PEEC et les dispositifs d’épargne salariale existants.

Cette mesure, calibrée, simple à mettre en œuvre via des accords d’entreprise ou des partenariats bancaires, offre un triple bénéfice :

  • Pour le salarié : amélioration de sa capacité d’emprunt sans ponctionner son épargne retraite.
  • Pour l’employeur : outil de fidélisation et d’attractivité à coût maîtrisé.
  • Pour l’État : réduction du recours aux dispositifs d’exonération liés à l’épargne salariale et recettes nouvelles via le forfait social.
Amendement n°AS1469 déposé le jeudi 23 octobre 2025
plfss 2026 crédit immobilier employeur - un couple d'acheteurs heureux
©fizkes - Shutterstock

La porte d'entrée vers la propriété qui s'agrandit

L'amendement mentionne que les projections de la Sofiap dessinent un scénario ambitieux de 26 000 prêts immobiliers qui pourraient être financés dès la première année d'application du dispositif réformé. Sur huit ans, le soutien concernerait plus de 400 000 ménages. Des chiffres qui peuvent sembler optimistes, mais qui reposent sur un calcul pourtant simple : avec 600 000 salariés déjà éligibles et une fiscalité enfin respirable, le dispositif passerait du statut de curiosité administrative à celui d'outil de politique sociale.

L'effet de levier pourrait s'avérer considérable pour les primo-accédants coincés entre des prix qui ne baissent plus vraiment et des taux qui ne retrouveront probablement jamais leurs niveaux d'avant 2022.

L'aide employeur viendrait ainsi compléter un arsenal déjà existant : le PTZ, souvent essentiel pour l'achat d'un premier logement, et le prêt Action Logement à 1 %, plafonné et souvent insuffisant face à des apports personnels qui grimpent. Avec une prise en charge pouvant atteindre 3 709 € par an sur plusieurs années, le dispositif Sofiap réformé pourrait redonner de l'air à des dossiers d'emprunt aujourd'hui bloqués par les banques.

La mesure arrive à point nommé précisément alors que le PTZ est amélioré depuis 2 ans avec un élargissement à tout le territoire, le retour de l'éligibilité des maisons neuves, une augmentation des quotités, l'augmentation des tranches et même la création d'une nouvelle tranche pour permettre à de nombreux ménages supplémentaires de pouvoir bénéficier du dispositif. Une nouvelle aide cumulable avec le PTZ est évidemment la bienvenue et pourrait très bien redonner le coup de boost tant attendu au secteur de l'immobilier.

La course d'obstacles parlementaire commence

L'amendement entame cette semaine son parcours dans les méandres de l'Assemblée nationale. La commission des affaires sociales a débuté l'examen du PLFSS 2026 le 27 octobre, avec près de 1 400 amendements déposés sur l'ensemble du texte. Le volet consacré au soutien employeur devrait être examiné entre le 3 et le 7 novembre. Si la commission valide le dispositif, une adoption en séance plénière pourrait intervenir autour du 12 novembre, avant que le texte ne poursuive sa route au Sénat.

Le calendrier reste serré, d'autant que le climat parlementaire actuel n'a rien d'un long fleuve tranquille. Les débats sur le PLFSS s'annoncent houleux, avec des enjeux budgétaires majeurs comme la réforme des allègements de cotisations patronales ou le gel des pensions de retraite. L'amendement sur le crédit immobilier devra se frayer un chemin entre ces dossiers explosifs. Son caractère transpartisan constitue néanmoins un atout car rares sont les textes qui réunissent socialistes, macronistes et républicains sur une même ligne.

Si tout se déroule comme prévu (ce qui reste un grand « si » dans le contexte politique français de 2025), le dispositif pourrait entrer en vigueur dès janvier 2026. La Sofiap devra alors monter en puissance rapidement pour accompagner les entreprises dans l'adhésion au mécanisme et les salariés dans leurs démarches. Un défi opérationnel qui nécessitera des moyens à la hauteur des ambitions affichées.

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